Le Sommaire | Carp Lsd Article
Se préparer à voyager en terres inconnues, notamment lorsque l’on souhaite profiter de ses vacances familiales pour faire quelques sorties de pêche improvisées, commence toujours de la même façon : trouver des informations, et si possible les bonnes.
C’est là l’essentiel. Quand on pêche dans des environnements inconnus où il est difficile de communiquer, ça rassure de savoir ce que l’on fait. Suivant que l’on parle anglais, on peut parfois se débrouiller et trouver facilement des contacts, notamment via les réseaux sociaux.
C’est d’ailleurs à mon sens un des intérêts majeurs de ces sites qui permettent de rencontrer des pêcheurs passionnés, de sympathiser, prendre connaissance de la législation et parfois même organiser une sortie avec des pêcheurs locaux, désireux et fiers de vous faire découvrir les beautés de leur pays.
J’ai la chance d’avoir un ami pêcheur japonais rencontré en Malaisie, il y a quelques années, et avec qui j’ai gardé contact. Le rendez-vous est pris pour une sortie d’une journée de pêche à la carpe en street quelques jours après mon arrivée.
Lorsque l’on voyage ainsi, il est nécessaire d’être très léger, d’autant que parfois, on n’a même pas l’occasion de sortir le matériel, suivant les aléas du voyage. Ne pas souffrir de l’encombrement du matériel permet aussi de se rappeler qu’à l’origine, on n’est pas là pour ça, mais pour vivre, voyager, découvrir.
Depuis maintenant plusieurs années, je voyage avec une Shimano STC multitravel : dans son tube rigide, elle est en sécurité. Un moulinet de la même marque de type DL 4000 FA avec 2 bobines (tresse et nylon) complète l’ensemble.
Il est assez compact et suffit largement. Après quelques recherches, j’ai rapidement constaté que la pêche de surface tenait une place importante, notamment dans mes futurs terrains de jeu, les rivières urbaines.
Quelques hameçons flottants, quelques bread bomb de chez Nash, un petit fluorocarbone de 25/100 et un pot de pop-up viendront parfaire l’ensemble. Je fabriquerai un tapis de réception sur place. Je prends un peu d’excédent, j’aime laisser des souvenirs à ces gens qui croisent ma vie et m’apportent ces moments inoubliables. Une canne, un moulin, une petite boîte de matériel. Je suis prêt pour le pays du soleil levant.
La rivière Arakawa est réputée des pêcheurs de carpe du Japon !
Au pays des berges propres…
Tokyo est comme on l’imagine, plus belle encore. Dans ce paysage futuriste, la mégalopole de plus de 600 millions d’habitants offre des contrastes très forts entre nouvelles technologies et tradition nippone.
Si le business center est principalement occupé par des grattes ciel et constitue le cœur touristique de la ville, en s’éloignant de quelques kilomètres, Tokyo révèle à celui qui les cherche de véritables petits écrins de nature.
Elle est parcourue par de nombreux cours d’eau. Fleuves immenses, rivières limpides et canaux urbains qui tous présentent des eaux d’une propreté visuelle incroyable : pas une bouteille en plastique, pas de déchets flottants. Malgré une société ultra-consumériste, les cours d’eau sont à l’image de la ville, d’une propreté déconcertante… Et ça fait vraiment plaisir.
Pour cette première partie de pêche tokyoïte, j’ai rendez-vous avec mon pote Tomohiko Sato. Il est originaire de la ville et pratique de nombreux types de pêches tant en eau douce qu’en mer depuis de nombreuses années.
Aujourd’hui, il souhaite m’emmener pêcher sur la rivière Arakawa qui constitue un des cours d’eau majeurs de la ville. Pêcher la « Koï », qui désigne là-bas la carpe sauvage et non les magnifiques carpes d’ornements multicolores, ne nécessite aucun permis de pêche. En revanche, la pêche de nuit est interdite presque partout.
Pêche de la carpe sur la Arakawa River
Il est 5h du matin. Il fait déjà chaud dans la douce lumière du crépuscule, annonçant une autre journée extrêmement chaude. La ville s’éveille à peine tandis que je déambule pour rejoindre la gare d’Akado où un train doit me conduire directement à celle d’Akabane qui constitue notre point de rendez-vous.
Le billet en poche, je patiente quelques minutes avant que le train n’arrive et 30 minutes plus tard, je retrouve Tomohiko. Nous traversons tout d’abord l’immense rivière pour rejoindre l’autre rive, plus accessible pour pêcher du bord et surtout qui présente quelques canaux urbains absolument charmants, nous offrant ainsi plusieurs possibilités de pêche.
Nous sommes rapidement rejoints par un autre ami de Tomohiko, Akira Suzuki qui se joint à nous. Canne en main, nous déambulons le long du fleuve durant quelques heures, lançant çà et là dans des zones calmes. Nous avons équipé nos lignes d’un grand flotteur traditionnel en bois, qui surplombe un hameçon taille 8 esché d’une petite boule de pain de mie.
Cette technique est, selon eux, une des plus efficaces et permet également de pêcher la « Silver Carp » en travaillant dans des couches d’eau moins profondes. Nous prospectons ainsi plusieurs affluents du fleuve des heures durant.
Les pêcheurs que nous croisons ne sont pas très optimistes au regard des températures caniculaires. Nous sommes en plein soleil, sur des rampes de béton, aucun abri à l’ombre, des réserves d’eau qui diminuent à vue d’œil… A 13h, nous décidons d’un commun accord de mettre fin au calvaire et d’aller nous réhydrater.
Après le déjeuner, nous profitons de la voiture de Suzuki pour longer les canaux en ville. Partout, nous apercevons des poissons en surface : des communes, des Silver et même quelques « Northern snakehead » çà et là.
Il y a du monde dans ces canaux, je vous le dis. Nous sommes dans des conditions typiques où les poissons sont tellement végétatifs qu’ils ne daignent pas prêter attention à nos appâts. L’eau est très chaude due à des profondeurs d’à peine 1,50m.
Je décide donc de tenter après quelques heures une approche différente, en pêchant au fond à l’ombre d’un petit pont tandis que les collègues continuent de pêcher au flottant. Rien n’a faire, il faut s’y résoudre.
Pourtant, le soleil amorçant sa descente et les températures diminuants, je me dis qu’il faut persévérer. Je remonte donc en flottant, frustré par les dizaines de poissons, parfois énormes, que je vois passer dans mes pieds.
Après une longue attente, tandis que j’observe la vie autour du canal, mon regard se pose à nouveau sur mon flotteur… qui n’est plus là. La bannière est en train de se tendre. Je saisis à peine ma canne que je suis déjà en tension avec le fish ! C’est parti !
J’engage un combat tout en puissance. Le poisson bridé éclate en surface à maintes reprises, attirant les passants, curieux de ce spectacle. Tous affichent un large sourire et une belle ambiance se crée sur ce petit bord de canal, où tout le monde attend de voir le poisson que le touriste que je suis va sortir.
Rapidement je sens que le poisson est de belle taille, mais j’ai également le sentiment qu’il ne s’agit pas d’une carpe. Après un chouette combat, c’est en effet une magnifique « Silver Carp » qui rejoint le filet.
C’est une première pour moi alors je suis doublement content. Nous exultons. Les copains sont aux anges d’avoir sauvé la journée et les passants reprennent désormais leurs activités.
Un beau cliché de ce poisson impressionnant et c’est déjà la remise à l’eau. C’est une fin de journée réussie pour ma première sortie de pêche à Tokyo. Il ne restait plus qu’à rejoindre le centre-ville pour passer une agréable soirée et évoquer ces premiers instants de pêche au Japon.
Notre planning étant fait à l’avance pour des raisons de réservations de guest-house, il nous fallait maintenant quitter cette incroyable ville pour une nouvelle destination, et non des moindres : la ville culturelle par excellence, la superbe Kyoto. Mais j’avais d’ores et déjà bloqué le créneau pour pêcher à Tokyo une dernière matinée avant de reprendre l’avion en fin de séjour…
Pêche de la carpe sur la Tama River
C’est sur les conseils de M. Toru Tanaka, le boss du team Carp Only Team Japan, que je me suis donc rendu sur les berges de la rivière Tama. Cette rivière est très connue des pêcheurs de carpes, mais pas seulement.
Elle est également connue pour abriter des espèces exotiques, tel que l’alligator gar, qui lui vaut son surnom local de « Tamazone » River. Une fois de plus, il s’agit d’un gros fleuve urbain, mais qui présente une configuration différente de la rivière Arakawa.
En effet, elle offre plus d’accès au lit principal et présente plein de petits courants très calmes formant des pools dans lesquels se trouvent les carpes. Dans cette eau limpide, cela ne signifie qu’une chose, pêche à vue !
Pour rejoindre la rivière, j’emprunte le métro puis le train jusqu’à la gare de Izumi-Tamagawa. Finalement une heure de transport porte à porte depuis notre guest-house. Inutile de dire que le rail et le métro sont au Japon d’une efficacité déconcertante.
Aucun retard de plus de quelques secondes, une signalisation relativement simple pour s’orienter dans les gares. Bref, c’est loin d’être la galère que l’on pourrait imaginer.
Cette fois-ci, c’est seul que je me dirige vers ce qui sera ma dernière petite sortie de pêche. Arrivée à la gare vers 8h, j’en sors et me dirige vers ce terrain de jeu magique.
Je monte rapidement la canne tandis que j’observe déjà des poissons qui créent des remous en surface. Je sens que l’excitation monte. Je précise que ce genre de configuration, où l’on ne pêche pas le lit principal mais des petites « rivières » en marge de ce dernier, il ne faut pas compter, sauf coup de chance, tomber sur les gros spécimens de carpes ou d’amours qui font la renommée de cette rivière chez nos confrères nippons. Je suis là pour faire un fish, un point c’est tout !
Je repère rapidement un petit pool situé sous le pont de chemin de fer où semble présent un banc d’une dizaine de sujets allant jusqu’à 50cm. Ils se déplacent de concert, avec une grâce et une confiance déconcertante.
Je jette alors quelques morceaux de pain, pour voir si cela pourrait en tenter quelques-unes. Rapidement, elles arrivent dessus et après une étude de l’objet, l’une d’elles se saisit alors du pain.
Je répète ainsi l’opération plusieurs fois pour les mettre en confiance. L’eau est très claire et je pense qu’elles vont rapidement voir mon fil, même un petit fluorocarbone. Après 15 minutes à m’amuser à les nourrir, il était temps de poser l’appât. Le bout de pain est posé dans 30cm d’eau, en bordure directe, à mes pieds.
Il ne faudra pas attendre longtemps pour que j’entende le signal, ce bon vieux bruit de succion. Le moulin, desserré, s’emballe et je prends alors contact. Quel plaisir ces combats sur des petites cannes légères.
On prend son pied des minutes durant sur des poissons de quelques kilos qui offrent des combats où l’on observe chaque fait et gestes du poisson. Des moments incroyables d’intensité.
Après quelques minutes de combat, je mets au sec une petite carpe « mopse » que je n’avais même pas repérée dans le banc. Un poisson, une photo, un sourire. La matinée était faite. Je relâche ce poisson dans son élément cristallin et me dirige en amont, vers le second pont.
Arrivée à son niveau, je discerne une carpe. Seule, elle crée des sillons dans l’eau d’un petit bassin naturel à l’ombre de la structure de béton. Ma canne étant prête, je lance dans sa direction sans amorcer préalablement.
La conclusion ne sera pas longue à se faire connaître. Le poisson change instantanément de direction et se dirige vers le pain qu’elle gobera sans même s’arrêter de nager. Ferrage !
C’est reparti pour un petit combat des plus plaisants. Je gère le poisson avec délicatesse, rien ne presse. Je m’enivre de chaque seconde de ce petit bonheur qui m’est offert. Le poisson finira lui aussi au sec et rejoindra rapidement son environnement.
C’est totalement satisfait que je reprends mon arpentage, rêvant même d’un troisième poisson. Malheureusement la chaleur augmentait considérablement tandis que l’heure avançait, et mes expériences passées me laissaient à penser que ces conditions allaient rendre les poissons moins mordeurs.
Cette théorie s’est rapidement vérifiée. En effet les deux pools suivants, qui présentaient tous deux des bancs de poissons, n’allaient m’offrir aucune touche.
Pire, les poissons dédaignaient purement mon appât et les rares à s’en approcher ne se laissaient pas avoir et procédaient immédiatement à un demi-tour pêchu, levant du fond tous les sédiments. Il fallait se rendre à l’évidence. Je décidais donc d’amorcer le trajet du retour avec le sentiment du travail accompli…
Un grand merci à Tomohiko, Suzuki et M. Toru Tanaka pour leurs précieux conseils et ces bons moments de partage. Si vous souhaitez pêcher à Tokyo, contactez Tomohiko Sato sur Facebook. Il saura vous orienter et vous fournir tout un tas d’informations. Fabien Prevost