Sessions - Récits

Une année de rêve | 1ére partie

François Huaumé

Nous venons à peine de passer 2020 que les projets fusent déjà dans ma tête. D’ailleurs, c’est un peu le bordel là-dedans, car il y a tellement d’endroits que j’aimerais pêcher !

Ayant une vie sociale et un boulot prenant, je ne dispose que d’un temps de pêche limité et ne peux malheureusement pas faire tout ce dont j’aurai envie. Concernant mes destinations, je dois donc faire des choix, et j’avoue que quand il s’agit de planifier des sessions à l’avance, ceux-ci ne sont pas toujours évidents à faire.

Pour éviter de me disperser et pour rester efficace, je me fixe dès le début de l’année des objectifs et des priorités auxquels je me tiens. C’est ce que j’ai fait en 2019 et une fois de plus pour ma plus grande joie, cela a porté ses fruits ou plutôt ses trésors ! Laissez-moi vous raconter…

Une seule chance…

Comme tous les ans, les divers salons auxquels j’ai l’occasion de participer prennent fin. L’ambiance de ces journées passées au milieu de passionnés ajouté au manque de ma petite trêve hivernale ne mettent pas longtemps à m’exciter. Il faut que je pêche et vite !

Je ne mets pas longtemps à combler ce besoin puisque courant de ce mois, mon pote Nicolas Scournaux me rejoint pour trois petites nuits. Malheureusement, Il fait encore bien froid et le réservoir sur lequel nous avons jeté notre dévolu est encore endormit.

Une année de rêve
Mon pote Leon tombait à pic pour poser avec Nico et son premier poisson !

Nous sommes bien conscients que nous arrivons un poil trop tôt, mais nous ne pouvions pas faire autrement pour obtenir des dates communes et de toute façon cela aurait été risqué de repousser tant le lieu est convoité. Ce réservoir héberge un cheptel impressionnant parmi lequel nage une carpe de 30kg que j’aimerais bien attraper.

Évidemment, je ne suis pas le seul et d’ici une dizaine de jours le secteur sera inaccessible, sauf pour les gens qui ont le temps de camper en attendant qu’un poste se libère, mais ce n’est pas mon cas. La chasse aux gros poissons me passionne mais il devient de plus en plus difficile de pouvoir les traquer paisiblement et sur certains endroits, cela peut même parfois virer au calvaire.

Vu que je n’ai pas envie de vivre ça, ce sera donc ma seule chance de pêcher ici cette année car pour la suite, j’ai des coups bien plus séduisants à tenter ailleurs en toute tranquillité. Les quelques jours de cette session ne seront malheureusement pas à la hauteur de nos espérances mais nous permettrons de prendre nos premiers poissons tout en passant un super moment agrémenté de la visite de mes potes Léon et Christophe le boulanger.

Il est temps d’atteler le cabine…

Une année de rêveLe planning d’avril est bien serré pour moi et je dois me contenter de seulement trois petites nuits réparties sur le mois. Je choisis de les passer sur un bief de canal que je n’ai encore jamais essayé.

Je suis fan de l’ambiance et du mystère qui plane sur ces eaux intimes, de plus elles se prêtent à merveille pour des petits coups rapides. Chacune de mes nuits est récompensée par de jolies carpes dont une superbe commune de 20kg.

Le mois de mai est enfin là ! Il était temps. Je me languissais de pouvoir atteler mon cabine pour repartir à l’aventure sur le géant qui me passionne. Il fait chaud depuis plusieurs jours et trouver les carpes ne devrait pas être difficile.

D’ailleurs mon pote Roméo est déjà en action et m’indique que le créneau n’est pas mauvais. Il est même bon, très bon, en tout cas pour lui ça commence bien.

Quelques jours avant mon départ nous échangeons par téléphone et élaborons une stratégie évidente. Celle-ci nous permettra en pêchant chacun de notre bateau, dos à dos, espacé de plusieurs centaines de mètres, de cerner le secteur. Tout nous semble parfait et laisse présager un véritable carton ! Les carpes sont sur la zone, elles se nourrissent, il fait le temps idéal et je dispose de 5 jours.

Seule ombre au tableau et pas des moindre, à croire qu’il en faut toujours une, une méga chute de température est annoncée pour le lendemain de mon arrivée. Shit !
Je sais que ce n’est pas très bon et j’hésite même à partir mais j’ai beau essayer de me résonner, l’envie l’emporte sur la raison. Et Merde ! J’y vais quand même, ça fait des mois que j’attends ça, mes congés sont posés, je verrais bien.

Durant le voyage je peste comme un vieux bougon dans ma voiture. Une semaine de beau temps, et comme par hasard je suis poursuivi par les nuages pendant tout mon trajet. Grrr ! Bien sûr, arrivé sur place, il se met à pleuvoir tellement fort que je suis condamné à rester dans mon Jumpy. Au bout d’une heure seulement et quelques nouveaux râlements, une petite éclaircie pointe enfin le bout de son nez. J’en profite pour charger mon matos et embarquer.

J’ai du bol, les nuages se dissipent et ma navigation se fait au sec. J’aperçois enfin Roméo, je peux ancrer mon navire. Après une rapide visite pour le saluer, j’ai juste le temps de revenir à mon bateau pour tendre mes lignes avant la nuit. Je suis assez déçu de ce que je découvre.

Si Roméo semble avoir de beaux spots avec de belles tâches à pêcher, mon côté a moi est dégueulasse. Toute la berge que je veux exploiter est couverte d’algues vertes filamenteuses au point que je me demande vraiment où je vais pouvoir poser mes pièges.

Une année de rêve
Le canal réserve de belles surprises, comme cette superbe commune de 20kg !

Je n’imaginais pas trouver ce merdier, je pensais découvrir quelques taches ayant été fouillées mais il n’en est rien. De plus, le vent se levant et la pénombre déjà bien installée ne m’aide pas pour une prospection de précision.

Je dois pourtant faire avec ces éléments car il est trop tard pour changer de place. Malgré le manque d’indices concernant les zones visitées du secteur, je déduis en toute logique que les carpes voulant entrer ou quitter la baie doivent emprunter la pointe qui se trouve devant moi.

De près ou de loin, je ne le sais pas encore, mais pour en avoir le cœur net, je pars immédiatement déposer un premier montage dans 60cm d’eau au ras des roseaux, puis un deuxième décalé de quelques mètres dans 1,50 mètres.

Pour la première dépose, j’ai pu voir ma bouillette se poser sur le fond donc je suis sûr que ça pêche bien. Pour la deuxième, j’ai assuré le coup en mettant une grosse mousse soluble sur la pointe de mon hameçon et je n’ai pas vraiment senti d’accroche en posant, ça doit le faire aussi.

Pour l’amorçage j’ai fait assez light. J’ai semé quelques poignées de billes suprême écrevisse en faisant un chemin d’interception du large vers la pointe de roseau. Je suis confiant, si des barbillons s’aventurent par ici, ils risquent d’êtres surpris.

Pour ma troisième canne, je finis quand même par trouver une trouée pas trop sale entre deux touffes de roseaux plus loin dans la baie. Et pour finir, je place la quatrième à une quarantaine de mètres derrière moi dans 3 mètres de profondeur. Vue comme l’eau a bien chauffée ces derniers jours, je pense que les carpes rôdent plutôt en bordure mais sait-on jamais…
Après un traditionnel apéro en solitaire et une petite collation, je ne tarde pas à sombrer.

Je ne sais pas depuis combien de temps je dors, mais ce qui est sûre c’est que je ne rêve pas ! L’alerte est donnée et la canne de la pointe déroule plein pot !
Quelques secondes seulement me suffisent à enfiler mon gilet de sauvetage et sauter dans mon Zod. Moteur pleine puissance, je file à la rencontre de ma surprise qui ne semble pas vouloir se montrer bien coopérative.

Pourtant, ne lui en déplaise, c’est bel et bien moi qui ai le dernier mot et vu le mastodonte qui est au fond du filet cela aurait été bien triste que ça finisse autrement. Je suis aux anges, la situation ne me semblait pourtant pas idéale, mais dès la première touche ce géant m’offre ce que j’étais venu chercher ; un méga fish !

Une année de rêve
Le géant m’offre ce que j’étais venu chercher !

J’ai beau être fatigué, j’ai hâte que le jour se lève pour partager ma joie avec mon ami et poser devant l’objectif avec cet énorme poisson de 26,800kg !
Celle-ci sera malheureusement de courte durée puisque dès l’après-midi suivant, juste après la capture d’un petit poisson, le déluge que la météo prévoyait s’abat subitement sur le lac.

Je n’ai pas le souvenir d’avoir vécu ça un jour. Pour une fois, les différents analystes du ciel ne s’étaient pas trompés. J’ai à peine le temps de mettre mes affaires à l’abri et de fermer ma cabine qu’un vent de malade associé à une pluie diluvienne se met à balayer le lac dans tous les sens !

Je vous garantis que nous n’en menons pas large. En boules au fonds de nos bateaux nous encaissons des rafales à plus de 70 km/h. Se sont maintenant des orages, du grésil, de la grêle et enfin de la neige qui prennent le relais. Cette après-midi et cette soirée nous paraissent interminables.

Une année de rêve
J’ai hâte que le jour se lève pour poser avec cet énorme poisson de 26,800kg !

Nous avons tout eu ! Nous venons de passer de vingt degrés à presque zéro en à peine quelques heures ! Avec cette apocalypse je ne vous fais pas de dessin, tous les poissons ont quitté la zone et ont la gueule clouée.

Je pourrais insister davantage mais après une nuit stérile suivie d’un essai sur un autre poste, je préfère écourter ma session et garder mes jours restant pour une autre fois. Sur le retour j’ai beau savourer la réussite de cette prise, la frustration de savoir que cette session aurait pu être un carnage me gagne et me pousse à me venger goulûment sur un pochon de M&M’s.

En duo avec le frangin

De retour à la maison, j’ai déjà hâte de revenir prendre ma revanche mais ça ne sera finalement pas avant début juin. Cette fois je ne subis aucune misère du ciel, mais simplement la malchance de tomber au mauvais moment. Ces dames venant tout justes de frayer ne me montrent pas encore leur appétit féroce et semblent avoir besoin de repos.

Une année de rêve
Rien de tel qu’un bon pote pour partager un tel moment !

Les seules touches que j’enregistre m’offrent des poissons qui ne sont pas au plus chouette de leur forme. Je préfère les laisser se requinquer et plutôt que de gaspiller mes journées précieuses, rentrer bosser.

Pour me rattraper de cette sortie miséreuse, je prévois tout de même deux week-ends avec mon frère Jérémy sur un lieu qui m’est cher n’étant autre que celui où ma passion est née.
La dernière fois que nous avions pêché là, nous avions fait un malheur en conditionnant une bonne partie du cheptel grâce à un amorçage effectué d’une façon peu commune.

C’était il y a 10 ans déjà, le souvenir de nos 120 départs sur deux 48h nous avait marqué et nous espérions renouveler l’exploit. Depuis, le cheptel n’est plus tout à fait le même, certains poissons ont bien grossi. Nous sommes sûrs qu’en misant sur une pêche de rendement, nous devrions réussir à attraper l’un des plus gros d’entre eux.

A objectifs ambitieux, résultats probants… Nous enchaînons les départs et le pavé tombe !

Début août, comme à notre habitude, nous partons pour 6 jours à bord de mon bateau. Notre objectif est de passer un vrai bon moment entre frangins coupés du monde en étant à 100% dans notre pêche. Il fait une chaleur à crever, les conditions ne sont pas optimales mais notre remise en question quotidienne porte ses fruits et nous gratifie de quelques belles prises dont un magnifique spécimen à la robe sombre comme je les aime. Je kiffe ce poisson !

Cette session est passée tellement vite… Malgré la vie confinée dans nos 7m² je vous assure que nous l’aurions bien prolongé.

Je n’imaginais pas pouvoir renouveler ce si bon moment cette année, mais un changement de planning dans le boulot de mon frère nous offre une belle opportunité mi-septembre. Ni une, ni deux, nous voici ancré pour quatre jours sur mon géant de cœur.

Une année de rêve
Le pavé tombe : 25,500kg !

Nous nous remémorons la première session que nous avions fait sur ce lac l’année dernière et l’échec de nos deux premiers jours passé sur ce poste. Avec du recul, nous estimons ne pas l’avoir abordé de la meilleure façon. Ne voulant pas rester sur une défaite et sachant qu’un vent soutenu souffle ici depuis plusieurs jours, nous voilà prêts à ré-ouvrir un chapitre.

D’un commun accord, nous plaçons nos montages en évoquant les variantes à appliquer si nos premiers 24h n’étaient pas top. Pourtant, malgré notre confiance et une pêche à 360 degrés tous nos détecteurs restent muets. Le lendemain nous hésitons à bouger mais après une longue discussion nous nous remotivons car il nous reste des cartes à jouer.

Nous voulons absolument essayer les autres spots que nous avons repérés la veille. Si ceux-ci ne donnent rien, il nous restera quand même 48h pour tenter notre chance ailleurs. Un super ami qui se reconnaîtra me dit souvent qu’il faut passer au moins deux jours par poste avant de bouger.

Il n’a pas tort, tout peu arriver et très vite ! Ce soir, assis sur le pont du bateau, la fraîcheur tombant sur nos épaules, nous admirons la lueur de la lune perçant les nuages tout en nous régalant des hululements d’une chouette de la forêt voisine.

L’ambiance est particulière, si particulière qu’avant de me coucher je vérifie que nos gilets de sauvetage soient bien à porter de mains et que tout le reste soit prêt pour le combat. Il va se passer quelque chose, c’est certain.

Mon frère ne tarde pas à s’endormir, je lutte pour profiter de l’instant, mais le sommeil fini quand même par m’emporter…

Une année de rêve
Un magnifique spécimen à la robe sombre comme je les aime de 24,100kg !

A suivre…

La suite c’est ici

Articles liès à la même thématique

Bouton retour en haut de la page
Chargement...