de Saud Merdovic
Lors de ces dernières années, sur la plupart de mes terrains de jeu où je pratique plus ou moins régulièrement, la pêche est différente d’une année sur l’autre.
Les carpes sont plus compliquées à piéger car leurs comportements changent aussi avec le temps et la pression de pêche.
Toutes ces attitudes ont changé soudainement après la crue exceptionnelle dans ma région, de la Seine en juin 2016 et ses affluents en amont, notamment la Marne, l’Yonne, l’Essonne, le Loing…
La hauteur du pic du Loing, par exemple, a dépassé le record de 1910 de 4.25m à 4.63m. La vue des photos et des vidéos aériennes est impressionnante.
Les vallées ont été complètement inondées. On voyait tous ces petits lacs transformés en un seul.
Après tous ces événements catastrophiques, les carpes en ont profité pour voyager d’un lac à l’autre. Beaucoup de lacs ont perdu leur cheptel et d’autres se sont enrichis.
Dans les rivières, nagent des poissons de lacs et on trouve dans les eaux courantes des poissons surprises comme des carpes koïs, des esturgeons ou des amours blancs probablement venus de lacs privés.
Les cartes sont totalement redistribuées et on prendra bientôt peut-être un esturgeon sous la tour Eiffel !
Fishing adaptation
Avec cette nouvelle situation, j’ai été obligé de m’adapter aux nouveaux comportements des carpes.
Dès les premiers mois, les résultats ont été maigres dans les lacs. L’eau a été polluée et les poissons survivants se nourrissent très peu ou pas.
Une grosse mortalité de poissons a diminué les cheptels. Dans les rivières ce fut un peu mieux.
La pêche reste classique malgré le fait que les biefs ne se ressemblent pas les uns des autres.
Certains sont envahis de silures ou de poissons blancs. Cela fait plus de 20 ans que je pêche dans la Seine en région Île-de-France et je peux constater qu’en amont de la Seine, le courant est plus faible qu’ailleurs.
Nous pouvons pêcher même sur la berge d’en face grâce au backlead (voir sur YouTube « Carpe Expédition » Vol3, film réalisé par Romaric Petit).
Dans les rivières de grands gabarits, j’utilise les cannes puissantes Blue Argon 13 pieds 3,5lbs et les moulinets robustes Sensium 8006fd.
C’est un ensemble best-seller de la marque Prowess. Au contraire, mon ami Jeremy pêche avec des cannes de 10 pieds et 3.5lbs Windfal et ça marche également très bien.
Les corps de ligne sur mes moulinets sont remplis de nylon de 0,40mm Topline.
Je monte aussi une tête de ligne de 0,60mm et d’une longueur d’environ 8m. Le montage pour ce genre de pêche est simple et costaud avec un bas de ligne long en tresse coulante de 45lbs.
Les hameçons sont de grosses tailles n°1 avec des plombs lourds 150 à 220g voire plus.
Pour moi, l’hameçon est la pièce maîtresse car il faut qu’il pique à l’extrême. Après chaque utilisation, je vérifie la pointe et au moindre doute je le remplace.
L’amorçage est un mixe de graines et bouillettes en quantité raisonnable selon la saison.
J’ai confiance dans les bouillettes QDB, Bloodworm Liver, Tuna Banana et Cream Litlle Corn qui prennent les carpes dans toutes les rivières de ma région ainsi que dans les lacs.
Une stratégie de pêche à 3
Pour les lacs, c’est une autre histoire. On ne sait plus où on peut pêcher. Je suis obligé de chercher de nouvelles destinations car après la crue, les poissons ne mordent plus dans ma région.
Pour les repérages, je fais plusieurs centaines de kilomètres avec ma voiture. Il faut trouver des endroits qui sont moins touchés par cette situation de crue.
Une fois que j’ai trouvé les lacs, il faut se mettre au travail. Dans la pêche, on en apprend tous les jours.
Avec mes amis Jérémy Koechler et Paul Drazetic, nous prospectons ces étendues d’eau pour mettre une stratégie commune en place.
Nous avons une réflexion sur les profondeurs idéales, la température des couches d’eau, le vent et l’ensoleillement.
Nous nous partageons la prospection. Et souvent ça marche ; comme quoi 3 personnes valent mieux qu’une.
Après avoir découvert les lacs, il faut ensuite trouver les carpes et je vais vous expliquer comment.
En avril-mai quand la température atteint les 18°C, nous cherchons les frais des carpes grâce au bateau pneumatique.
A cette période, nous pouvons voir des regroupements de carpes dans des zones précises.
C’est le bon moment pour visualiser et estimer des cheptels en présence éventuelle de sujets qui nous intéressent.
Nous cherchons de la nourriture naturelle dans les différents obstacles comme des pierres, des arbres morts, des herbiers, des algues pour la plupart en bordure, car ces endroits sont les mangeoires des carpes.
Les différentes fouilles au fond de l’eau ou cratères sont aussi importants pour mémoriser des zones propices.
La présence d’écrevisses, des dreissènes, des corbicules, des escargots d’eau, des moules, nous donne une idée sur la richesse des lacs.
Ceux qui sont riches en nourriture naturelle ne nous facilitent pas la pêche. Pour détourner les carpes de la nourriture naturelle, nous avons besoin d’un long travail de réflexion au niveau des appâts et de l’amorçage.
Les observations visuelles sont les clés pour trouver les carpes : les marsouinages, les sauts ou les bulles d’air en surface.
Quelques fois, les carpes occupent une zone de confort pendant la journée puis après se déplacent dans une autre zone pour se nourrir, souvent le matin tôt ou en début de soirée.
Des joyaux ultra sauvages de plus de 25 kilos
La topographie et les profondeurs sont aussi importantes pour analyser et estimer la trajectoire des carpes. Il faut trouver les meilleurs spots comme des hauts-fonds, les cassures de bordure, des spots sablonneux dans la vase et inversement.
La direction du vent dominant joue un rôle important pour le déplacement des poissons.
A certaines saisons, les carpes suivent le vent ou restent opposées à celui-ci.
La plongée estivale de Jeremy aide aussi, car on peut déterminer les hots-spots afin d’en profiter jusqu’en fin d’année.
Certains lacs sauvages ont besoin de la discrétion du pêcheur, il faut éviter le bateau au maximum surtout le moteur électrique.
Il faut penser au fil détendu si on pêche en bordure à courte distance. Avec Jérémy et Paul, nous avons observé certains lacs avec de très faibles cheptels, mais riches de grosses carpes.
Dans ces lacs riches en nourriture naturelle, nous avons enchaîné les capots, c’est un vrai casse-tête pour piéger les carpes.
Même si on a pu piéger une seule carpe pendant plusieurs week-ends, nous restons motivés à bloc, car nous avons pu apercevoir des carpes communes sauvages exceptionnelles par leur taille.
Cela dépend aussi de la présence des poissons-chats, des écrevisses ou des poissons blancs.
Personnellement, je préfère un petit amorçage attractif qui déclenche l’appétit immédiatement chez la carpe.
Tous les détails sont utiles pour analyser la stratégie de pêche au niveau des appâts, des amorçages, des montages etc.
Il faut aussi prendre en compte d’autres éléments importants comme la météo favorable (le vent, la pluie, le soleil, la pression atmosphérique).
Un bon appât posé au bon endroit ne suffit pas toujours, si la carpe décide de ne pas mordre.
La chance est aussi un facteur et il faut la provoquer au maximum. J’essaye de mettre toutes les chances de mon côté.
Finalement, nous nous sommes bien sortis au niveau des prises, soit dans la rivière soit dans les lacs.
Après la phase de prospection, nous avons pris en quelques sorties 3 carpes communes sauvages pour un poids total qui dépassent 80kg au total. Chacun a été récompensé par un trésor écaillé.
Cette année encore, nous avons été touchés dans ma région par la crue de la Seine en janvier.
Pas de chance pour nous, il faut encore à nouveau s’adapter. Espérons que cela réserve encore de nouvelles découvertes…
