Une fois que les mois froids d’hiver arrivent, je dois admettre que mon enthousiasme pour pêcher au Royaume-Uni commence à diminuer. Au lieu de passer les sombres nuits hivernales glaciales dans mon bivvy, ces dernières années, je me suis dirigé vers des climats plus chauds à la recherche d’un peu de soleil.
En 2018, je suis allé au Maroc pendant dix jours et cette année (fin 2019) ce fut le tour d’Orellana en Espagne. Cela fait longtemps que je voulais pêcher cet énorme réservoir et finalement j’y suis allé sur la période de fin novembre à début décembre.
Chercher la chaleur au cœur de l’hiver !
Mon ancien camarade Jim Lightfoot devait se joindre à moi, nous deux volant de l’aéroport de Manchester à Madrid où nous serions transférés au lac par l’un de mes amis espagnols, Gonzalo Gil Gongi, qui travaille comme rédacteur en chef pour le magazine Top Anglers.
Le plan était d’utiliser la société néerlandaise Angling Escapes comme base pour notre session. Propriété de mon vieil ami Edwin Wout et de sa femme Ressie, l’entreprise possède une maison sur les rives d’Orellana. Ils proposent tout l’équipement nécessaire en location, y compris des bateaux, des échosondeurs, des bivouacs, etc…
Nous n’avions qu’à emmener nos moulinets, nos détecteurs et notre boîte de petit matos dans nos bagages.
Les 48 premières heures du voyage ont malheureusement été un black-out pour moi, car j’avais attrapé une saloperie au Royaume-Uni qui m’a rendu bien malade. Je ne me souviens pas d’un moment où j’étais au bord de l’eau sans tendre mes lignes, mais cette fois-ci, je me sentais tellement mal que tout ce que je voulais, c’était dormir. Heureusement, cela n’a pas duré longtemps et deux jours plus tard, j’ai retrouvé la forme.
Le temps semblait parfait pour la période de l’année. Il ne faisait pas trop chaud, avec des températures moyennes de 15 degrés, beaucoup de nuages bas et des averses occasionnelles. Nous avions appris de l’un des pêcheurs réguliers sur le lac, David Molina, que le lac se pêche bien dans des conditions pluvieuses. Le vent devait changer presque tous les jours, ce qui pourrait perturber les choses, mais nous sommes restés optimistes.
Les chercher…
Sur un si grand lac, nous savions que la chose la plus importante était de trouver le poisson. Il nous a fallu près d’une heure de bateau depuis la maison d’Edwin jusqu’à l’endroit où nous avons décidé de commencer notre pêche. Nous nous sommes appuyés sur les informations des locaux, mais six jours après, nous en étions à notre cinquième poste et toujours dans l’attente d’un départ.
Il était assez surprenant de voir ce lac occupé avec des carpistes de différentes nationalités : des Néerlandais, Allemands, Français, Britanniques et beaucoup d’Espagnols aussi. Il y a pas mal de voyagistes opérant sur les rives d’Orellana, et avec la population extraordinaire de carpes présente dans ce lac, il n’est pas surprenant que le lieu devienne populaire.
Cet hiver, le site a produit une carpe massive, une miroir de 36,500kg. Bien sûr, un poisson de cette taille attire toujours l’attention, mais ce n’était pas la seule raison pour laquelle nous y sommes allés. Nous savions que le lac héberge une bonne quantité de communes de 20kg, avec dans le tas quelques poissons bien plus gros encore. Une conversation avec le carpistes local David Molina a révélé exactement cela.
David nous a dit qu’il y avait peut-être une douzaine de poissons de plus de 30kg à l’heure actuelle, dont une commune étant très proche de 40kg. Juste trouver où se tiennent les carpes c’était tout ce que nous voulions, et après six nuits d’essais, nous les avons enfin trouvées.
L’action peut commencer…
Elles se sont manifestées à très grande distance, juste au milieu du lac, dans une grande baie. Nous pouvions juste les atteindre avec les grosses bobines que nous utilisions. Les miennes étaient remplies de tresses et j’utilisais aussi des leaders monofilaments costauds de 50lb car il y avait beaucoup de roches et d’obstacles au fond.
Les carpes se montraient sur une zone profonde de 10 mètres, au sommet d’un grand plateau. De part et d’autre, la profondeur chutait à 13m dans le lit de la rivière. Nous avons essayé différentes profondeurs pour commencer, essayant de trouver où les carpes pourraient se nourrir, mais sans surprise, c’était au sommet du plateau où l’action a commencé.
Nous appâtions légèrement avec un mélange de graines (maïs, chènevis, tigers, etc.) qui formait notre base d’amorce. Juste trois ou quatre poignées par ligne, complété à chaque fois avec une douzaine de bouillettes de 26mm SLK. Chaque ligne ne pêchait que pour une seule touche à la fois.
La première nuit sur ce nouveau poste a été calme mais le lendemain, une fois le soleil levé, j’ai enfin eu un départ et pris ma première carpe d’Orellana, une commune d’une dizaine de kilos. On nous avait dit que les carpes ici mordaient surtout la nuit, donc c’était agréable de prendre un poisson en plein jour.
Monter une carpe de 10 mètres de profondeur et la regarder tourner en spirale sous le bateau dans une eau cristalline est une chose magnifique à voir. C’est toujours excitant de mettre le premier poisson dans le filet, quelle que soit sa taille. C’était notre première carpe et nous savions maintenant que d’autres allaient suivre…
La tempête salvatrice…
Les deux nuits suivantes, nous avons capturé cinq autres poissons, tous des communes de petite taille pesant en moyenne de 10 à 12kg. Il était pourtant évident qu’il y avait des poissons bien plus gros sur la zone, car nous les voyions se manifester régulièrement en surface. Dès le matin, ils étaient particulièrement actifs.
On les voyait rouler et sauter, mais nous avions l’impression que ces poissons restaient entre deux eaux. Nous avions besoin d’un changement de temps pour les faire descendre sur le fond, et ce changement de temps est arrivé la nuit suivante.
Il nous restait trois nuits de pêche quand le ciel a pris une apparence différente. Le gris pâle a été remplacé par un aspect beaucoup plus sombre alors qu’une tempête est arrivée et avec ça, la pluie aussi. Le vent assez froid tourna à l’est.
Nous ne pouvions pas rester dehors très longtemps avant que nos visages ne deviennent tout rouge et qu’une grosse goutte ne commence à se former au bout de nos nez !
L’eau en face était recouverte de mousse à cause des grandes vagues, mais c’étaient les conditions météorologiques dont un gros plan d’eau comme Orellana avait besoin pour avoir de la réussite. Nos quatre prises suivantes pesaient toutes plus de 17kg, la plus lourde étant un beau poisson de19kg pour Jim.
C’était notre meilleure pêche de nuit jusqu’à présent, avec une carpe sur chacune des six cannes, bien qu’il semblât évident que les poissons commençaient déjà à se méfier un peu…
Nous avons eu nos premières touches à environ 200 mètres de la berge et sous la pression les carpes commençaient déjà à s’éloigner un peu plus. Nous avons dû tendre à 250 mètres pour rester dans les fishs, puis à 300 mètres.
Bien qu’Edwin nous ait réapprovisionnés en batteries chargées pour les moteurs à chaque fois que nous en avions besoin, elles étaient désormais mises à rude épreuve. Ce n’était pas tellement la distance à laquelle nous pêchions, c’était la force du vent. Pour chaque poisson nous devions sortir en bateau pour le combat.
Les batteries se déchargeaient très vite et nous ne pouvions pas pêcher efficacement sans elles. Chaque fois que nous avons essayé de poser les lignes à la rame nous avions trop de bannière dans le fil. Une fois toutes les batteries vides, nous n’avions pas d’autre choix que de rentrer.
Faire le plein d’énergie
Après un rechargement des batteries, nous étions de retour en action la nuit suivante. Heureusement, les gros poissons étaient toujours là. J’ai encore pris quelques beaux poissons, dont un à un peu plus de 20kg. Jim a ensuite réalisé un magnifique doublé de communes en moins d’une heure.
La première pesait 21kg, et lorsque l’une de ses autres cannes a produit un départ de folie quelques instants plus tard, nous savions tous les deux qu’il avait quelque chose de spécial au bout.
Il faisait nuit noire et tout ce que je l’ai entendu dire en poussant son bateau, c’était : « Ça semble plus gros ». Une vingtaine de minutes plus tard, j’ai alors vu sa lampe frontale s’approcher de la berge. Là, dans le filet surplombant le côté de son bateau, il y avait une commune à couper le souffle, un poisson de 25,500kg !
Je suis rarement jaloux des autres, mais cette carpe était tout simplement magnifique ! Elle avait une teinte rosée sur les flancs du fait d’une alimentation naturelle constituée d’écrevisses. Jim était bluffé, et alors qu’il se tenait là avec le filet à la main, un immense sourire illuminait son visage ! C’était un moment à chérir et je me suis senti honoré de le partager avec lui.
La dernière nuit ne nous a pas apporté de poisson, mais aucun de nous ne s’en souciait. Nous avions bien profité du moment avec des beaux poissons. Du début à la fin, toute la session avait été une grande aventure. Nous n’avions pas cessé de nous appliquer le mieux possible, et c’était une fin convenable de voir les pièces du puzzle s’emboîter entre elles.
Un grand merci à Edwin et Ressie pour s’être occupés de nous. Respect pour Gonzalo et David également, pour tous leurs précieux conseils et informations.
Si vous aimez les très grands lacs publics, vous adorerez Orellana.
Que vous y allez par vos propres moyens ou que vous passiez par l’un des opérateurs sur place, c’est un endroit vraiment magnifique pour pêcher la carpe.
L’endroit est sauvage et parfait à tous points de vue.