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LA NOUVELLE MODE VINTAGE !

INTERVIEW AVEC LEON HOOGENDIJK

La carpe est vraiment un poisson extraordinaire puisqu’elle peut se pêcher de mille façons. Nous sommes tous pêcheurs de carpe mais n’avons pas forcément la même manière d’appréhender sa pêche.

Certains se spécialisent dans le « Spécimens Hunting » en grand lac, d’autres ne jurent que par les eaux courantes, des marins d’eau douce passent des semaines sur leur embarcation quand d’autres pratiquent uniquement sur de « speed session » ! Sans oublier les pêcheurs à la grande canne au coup, au quiver ou à l’anglaise, bref, la carpe est multi-pêche !

Parmi les innombrables façons de la traquer, une tendance, très populaire en grande Bretagne, en hollande et en Allemagne, encore peu développée en France, est la pêche en mode Vintage. A quoi cela consiste-t-il ? Quelle est cette nouvelle façon d’aborder la pêche de la carpe ?

Cette manière originale d’appréhender cyprinus carpio est liée à un état d’esprit bien particulier qui marque un amour profond pour la pêche et sa culture, un style qui n’accorde pas une importance capitale à la taille des poissons mais à l’ambiance générale, la richesse des sensations, bref, une philosophie loin des stéréotypes actuels.

Notre ami Leon, fan de matériel et de pêche Vintage, se passionne pour ce mouvement qui, soyons en certains, va tôt ou tard toucher la France. Au travers de cet entretien, Il nous dévoile les secrets du mouvement Vintage…

David : Tu es passionné par la culture pêche et plus particulièrement par le matériel carpe ancien que tu collectionnes. Une passion dans une passion ! Peux-tu nous en parler ?

Leon : L’amour pour la pêche vintage a toujours été ancré au plus profond de moi. C’est normal.

J’ai eu l’énorme chance de découvrir la pêche de la carpe au début des années 70, à une époque où on ne savait encore pratiquement rien sur ce poisson et où, aux Pays Bas, tout pêcheur de carpe qui se respecte savait tout sur ce qui se passait en Angleterre.., et tout ce qui s’était passé là-bas depuis le jour où Richard Walker a pris la fameuse Clarissa à Redmire Pool, en Septembre 1952 !

Mes héros de jeunesse étaient (et le sont toujours aujourd’hui !), bien sûr le grand Walker, Jack Hilton, Chris Yates et plus tard aussi Rod Hutchinson, tous des hommes qui sont entrés dans la légende ! Des hommes comme ça il n’y en aura plus, mais on peut conserver et chérir l’héritage qu’ils nous ont laissé !

Dans les années 70 on avait déjà des cannes en fibre de verre mais la pêche de la carpe en elle-même n’avait pas vraiment évoluée depuis le début des années 50, quand Richard Walker à plus ou moins inventé la pêche moderne de la carpe avec des cannes spécialement conçues pour cette pêche, avec sa première grande épuisette triangulaire, avec les tout premiers indicateurs de touche électroniques Heron, etc.

Dans les années 70 on pêchait toujours comme lui, avec une pomme de terre, avec du pain ou avec une boule de pâte molle sucré au miel. Nos Rolons ou BJ’s fonctionnaient de la même façon que ses Herons, nos cannes étaient des 10 ou 11 pieds 1,5 lb et les Mitchell 300 étaient toujours au top. Il n’y avait pas encore d’Optonic, ni de bouillettes ou de montages auto-ferrants, on ne pêchait pas la carpe en hiver et prendre un poisson de plus de 10 kg était considérée comme un véritable événement, un exploit !

La carpe était un poisson mystérieux réputé méfiant et difficile à combattre. Bon, on pêchait avec des cannes de 1,25 ou 1,5 lb montées en Nylon 0,22 ou 0,25mm, normal que les combats étaient délicats…mais quelles sensations ! Rien à voir avec les cannes 3,5 lb modernes utilisées aujourd’hui et que la plupart de carpistes n’osent même pas plier sur un poisson par peur de le décrocher…

Leon collectionne des moulinets, notamment les modèles emblématiques des années 30-70. Il en a déjà plus de 400, dont la plupart en état neuf ou proche du neuf. Il affectionne particulièrement les marques Mitchell, Luxor et Hardy.

Donc j’ai vraiment encore pêché la carpe à l’ancienne, en ce qu’on appelle aujourd’hui style vintage.., puis j’ai vécu, traversé, participé et même contribué à toute la phase de transition vers la version ultra-moderne de cette pêche telle qu’on la connaît aujourd’hui.

En l’espace de seulement quelques décennies la pêche de la carpe s’est tellement transformée.

Pas seulement sur le plan technique mais aussi en ce qui concerne la mentalité de pêcheurs, tous pratiquants du No Kill certes, mais pas pour autant tous porteurs de vraies valeurs qui dans le passé apportaient cette formidable note de noblesse à la pêche de la carpe.

Donc, quand on a connu l’univers carpe des années 70 (ou avant) on est forcément nostalgique ET on s’attache à la culture carpe, ou à la culture pêche en générale.

LA NOUVELLE MODE VINTAGE | CARP LSDUne partie du matériel vintage que Leon utilise de temps à autre pour prendre son pied comme dans le bon vieux temps. Faire revivre ce matériel au bord de l’eau permet de l’apprécier à sa juste valeur et de vivre des instants magiques avec à la clé des sensations extraordinaires !

J’avais depuis toujours gardé de vieux livres de pêche datant de mon enfance et de mon adolescence, mais je n’avais pas conservé le matériel avec lequel j’ai pêché dans le passé car je n’ai jamais été riche et pour acheter du matériel neuf pour rester au top (une obligation quand on est passionné à fond !) j’étais obligé de vendre à chaque fois tout mon ancien matos, chose que j’ai plus tard regretté, mais bon je n’avais pas le choix.

Puis un jour, il y a maintenant 5 ou 6 ans, j’ai eu l’occasion de me racheter une canne Hardy Richard Walker Carp N°1 en très bon état, une 10 pieds 1,5 lb, la même avec laquelle je pêchais à la fin des années 70 !

Bien sûr il fallait la compléter avec un moulinet de l’époque que j’ai trouvé pas longtemps après : un ABU Cardinal 44 comme neuf, la Rolls des années 70 ! Je suis très vite tombé amoureux de cet ensemble et j’ai commencé à m’intéresser de plus en plus au matériel ancien en m’inscrivant sur certains forums spécialisés pour échanger un maximum avec d’autres passionnés dans ce domaine.

L’acquisition d’une vraie et authentique B James and Son – Richard Walker MK IV en bambou refendu, une canne dont je rêvais depuis mon enfance (la toute première vraie canne à carpe au monde !), a eu un effet irréversible sur moi : j’étais désormais gravement contaminé par le virus « vintage » !

Peu à peu je me suis constitué une belle collection : des moulinets Mitchell, Luxor, Hardy, Shakespeare et ABU, des cannes à carpes Richard Walker MK IV et bien d’autres ressemblantes ou inspirées directement de celle-ci, mais aussi d’anciens indicateurs de touche, de vieux centrepins et même du matériel mouche et d’autres bricoles encore… je me suis même lancé dans la restauration d’anciennes cannes. A chaque fois que je trouve un nouvel objet j’en retrace toute l’histoire.

LA NOUVELLE MODE VINTAGE | CARP LSDEn tant que collectionneur je respecte deux règles en or qui évitent de faire du n’importe quoi : je m’intéresse qu’aux objets en très bon état et 100% d’origine et je m’oblige à rester très raisonnable dans mes dépenses !

Un poisson pris sur une canne Hardy Richard Walker Carp N°1 en fibre de verre (1969) et un moulinet ABU Cardinal 44 (1974).

Parfois on s’autorise une petite folie aussi. Par exemple la vraie épuisette Richard Walker en bambou laminé n’a été produite en seulement 30 exemplaires dans les années 50. Bien sûr il n’en reste que quelques exemplaires aujourd’hui, et les quelques heureux propriétaires (des collectionneurs fanatiques) n’ont aucune envie de s’en séparer.
Donc je n’avais aucune chance d’en trouver une un jour. Toutefois, les plans de construction et de montage de cette épuisette (réalisés par Walker lui-même) existent toujours.

J’ai donc demandé à un atelier en Angleterre de s’en servir pour en produire une à l’identique ! Sans cette épuisette mon équipement version « Walker » n’était pas complet. Maintenant le problème est réglé !

LA NOUVELLE MODE VINTAGE | CARP LSDUne carpe capturée sur une authentique B. James and Son Richard Walker MK IV en bambou refendu (1957) et un Mitchell 300 4ème version (1954).

David : Cet amour pour le beau matériel ancien ne se concrétise pas que par ton intérêt pour la collection que tu entretiens. Tu utilises aussi ce matériel d’époque pour pêcher de temps à autre. Dans quel but ?

Leon : C’est simple. Pour moi il est essentiel de connaître le mieux possible tous les aspects de chaque objet dans ma collection.
Pour un moulinet par exemple, je retrace non seulement l’histoire de sa commercialisation mais également l’histoire de sa conception. Je veux savoir qui était (ou étaient) impliqué(s) dans sa conception, dans quelle année et par quel ouvrier ce moulinet que je tiens en main a été réalisé.

S’agit-il d’un modèle de série ordinaire ou d’un modèle de transition, ou encore d’un modèle modifié ou customisé à l’atelier, spécialement à la demande d’un client ? Avec certains objets et notamment les cannes on peut même parfois retracer au jour près la date exacte de fabrication. Mais savoir tout ça ne permet pas encore de vraiment bien connaître l’objet.

Il manque une chose. Tant que je n’ai pas réellement pris moi-même quelques poissons avec, je ne pourrai jamais l’apprécier à sa juste valeur ! Emmener l’objet en question au bord de l’eau pour pêcher avec est pour moi non seulement la cerise sur le gâteau mais aussi un moyen de vraiment « tester » l’objet en question.

C’est à ce moment-là qu’on va vraiment se rendre compte des qualités (ou défauts) de chaque objet. Mais il y a plus encore ! C’est aussi un voyage dans le temps qui me permet de vivre des moments et des sensations extraordinaires. Quand je combats une carpe sur une canne en bambou refendu je tremble comme une feuille ! Quand le frein d’un vieux Hardy Altex se met à chanter c’est tout simplement magique !

LA NOUVELLE MODE VINTAGE | CARP LSD

David : La pêche « vintage » est un véritable phénomène de mode en Angleterre. D’après toi, pourquoi la pêche vintage suscite telle autant d’intérêt outre-manche ?

Leon : Les Anglais sont par nature très attaché à leur culture, que ce soit dans n’importe quel domaine, donc aussi dans la pêche. Là-bas il existe un nombre de livres hallucinant consacré à ce sujet. Ils ont aussi des magazines, sites Internet et forums « vintage pêche » spécialisés.

Ils sont des milliers à pratiquer la pêche vintage d’une façon ou d’une autre, avec du matériel de l’époque en bon état mais aussi avec des cannes en bambou refendu encore produites par quelques célèbres ateliers aujourd’hui.

Il y en a pour tous les goûts et tous les budgets. Il y en a même qui acceptent être mis sur une liste d’attente d’au moins 18 mois pour que le « Master Rod Builder » Fred Barder leur réalise une MK IV toute neuve à £ 2.200,00 €, soit un peu plus de 3.000,00 € !!! Chacun y vit sa passion selon ses moyens mais tous sont passionnés à fond autour du même sujet et tout le monde se respecte – c’est un vrai univers de « gentlemen ».

Ce sont à la fois des pratiquants et des collectionneurs (comme moi), et parfois aussi des investisseurs ou spéculateurs, car aujourd’hui il n’est pas encore trop difficile de trouver le matériel de l’époque (années 30-70), mais demain ce même matériel vaudrait une petite fortune.

On le voit déjà avec des moulinets Hardy produits entre 1895 et 1915 dont certains modèles se vendent à des prix exorbitants !

LA NOUVELLE MODE VINTAGE | CARP LSDExemple d’ingéniosité technique des années 30 : un Hardy Altex N°2 MK II avec une anse de panier automatique commandée par…des engrenages !!!

Mais il n’y a pas que les Anglais qui aiment la pêche vintage. Depuis une dizaine d’années ce style de pêche gagne aussi énormément en popularité dans d’autres pays, comme la Hollande, la Belgique, l’Allemagne, les Etats Unis, le Canada, l’Australie et même le Japon !!! Le vintage y est vraiment à la mode, les gens adorent pratiquer en style vintage car cela leur permet de réellement déguster chaque instant de la pêche…au lieu de la vivre à cent à l’heure en passant à côté de l’essentiel… La pêche vintage, ça fait du bien.., beaucoup de bien !

David : Penses-tu que dans notre pays cette « mode » a un avenir ?

Leon : Oui c’est certain ! Rien quand je vois le retour en MP (messages perso) sur ma page Facebook Pêche & Vintage Passion (www.facebook.com/peche.vintage.passion) je suis bluffé par le nombre de personnes qui sont intrigués par le sujet et qui me contactent par MP pour me poser des tas de questions. Combien ça coûte (pas forcément très cher !) ?

Où trouver une vieille MK IV, un Mitchell 300 en bon état, ou même un Hardy Altex ou Exalta ?!

La page compte déjà plus de 7000 abonnés, bien sûr beaucoup de curieux mais quand même quelques centaines de suiveurs qui s’y intéressent vraiment, et dont une poignée s’est déjà très bien équipée ! Nous ne sommes qu’au tout début, mais je suis sûr qu’il y aura demain une vraie communauté de pêcheurs vintage en France.., sauf qu’il est encore trop tôt pour savoir quelle sera son ampleur.

Peut-être seront nous que quelques centaines, peut-être quelques milliers… Mais il est évident que de plus en plus de pêcheurs vont découvrir et apprécier la beauté et la pureté de cette pêche qui nous emporte dans un tout autre univers avec des émotions et sensations uniques qu’on ne trouve nulle part ailleurs !

Leon est un fan inconditionnel du grand Richard Walker. Il possède ses cannes, ses indicateurs de touches, ses piques et même son épuisette : une reproduction fidèle de la version originale (elle introuvable aujourd’hui) réalisée spécialement pour lui dans l’atelier Norman Agutter en Angleterre !

David : Faut-il être un collectionneur de matériel ancien pour s’intéresser à et pratiquer la pêche vintage ?

Leon : Non, absolument pas ! L’un n’exclut pas l’autre, mais ce n’est pas une obligation, loin de là. Je connais de grands collectionneurs qui ne sont pas eux-mêmes pêcheur, et je connais des pêcheurs qui pratiquent le style vintage mais ne sont pas des collectionneurs dans le vrai sens du terme. Ces derniers sont bien équipés pour la pêche mais c’est tout.

C’est en pratiquant qu’ils prennent leur pied, ils n’ont pas besoin de collectionner des tonnes de trucs pour faire leur bonheur, ils se contentent de l’essentiel et s’éclatent à la pêche. Le collectionneur, le vrai qui se prend au jeu, lui, il ne s’arrête jamais. Il ne veut qu’une chose : voir grandir sa collection.., jusqu’à ce que sa maison soit complètement remplie (j’en connais quelques-uns !).

Mais ce qui compte c’est de prendre son pied, chacun à sa façon. Sinon, pour revenir à ta question ; Que faut-il pour s’intéresser à et pratiquer la pêche vintage ? La réponse est très simple. Il faut juste avoir une certaine ouverture d’esprit puis oser goûter une fois. Après on est foutu… enfin je pense si on est vraiment pêcheur dans l’âme…

David : C’est un retour aux sources ou bien une lubie pour pêcheurs âgés qui ne supportent plus la technologie qui envahit notre passion ?

Leon : Là encore on touche une idée reçue. La technologie des années 50 est déjà d’une ingéniosité absolument hallucinante !

Quand on s’intéresse un peu de plus près à ce qui se fabriquait à cette époque on découvre que la qualité de construction est exceptionnelle. La complexité et les détails mécaniques de certains moulinets ou encore la complexité de la conception et de la construction des cannes nous laisse parfois sans voix.

Un Hardy Altex est un œuvre d’art mécanique qui représente un travail artisanal colossal.., et très impressionnante d’un point de vue technologique. L’ouvrier hautement qualifié ne fabriquait qu’un seul exemplaire à la fois, en s’appliquant à fond et en laissant à chaque fois sa « signature ».

C’étaient des artistes ! Ce n’est pas de la technologie ça ? Aujourd’hui les moulinets sont fabriqués à la chaine en Chine, assemblés avec des pièces coulées qui proviennent de la sous-traitance « cheap », et sortent par milliers des usines chaque jour.
En fait les pêcheurs vintage adorent la technologie.., mais celle qui va dans le sens de la meilleure qualité. Donc, oui, il s’agit d’un véritable retour aux sources, et cela à plusieurs niveaux.

LA NOUVELLE MODE VINTAGE | CARP LSD« The Exalta MK II », le tout dernier moulinet spinning Hardy réalisé entre 1960 et 1965, une création exceptionnelle comme seule la maison Hardy sait les produire…

David : Quels types de matériel et quelles techniques sont envisageables pour pêcher la carpe en style vintage ?

Leon : En fait il existe plusieurs façons de pratiquer la pêche de la carpe à l’ancienne, soit en pur style vintage avec le matériel de l’époque, soit avec un matériel moderne mais dont les caractéristiques techniques se rapprochent de ceux du matériel ancien.

On voit déjà apparaitre par-ci et par-là sur le marché, à des prix très raisonnables, des cannes en carbone 10, 11 et 12 pieds d’une puissance de 1,5 ou 1,75 lb avec une belle action parabolique et joliment finies avec une poignée en liège. Il suffit de monter un moulinet pas trop gros (pas un Big Pit bien sûr !) et pas trop rapide pour que, avec un poisson au bout, on retrouve exactement les mêmes sensations qu’avec du vrai matériel vintage.

La pêche au flotteur, qu’on la pratique avec une vieille canne en bambou refendu des années 50, une fibre de verre de 10 ou 12 pieds des années 70, ou encore avec une canne 14 pieds 2,5 lb ultra-moderne en carbone (elle un peu plus adaptée à la taille des carpes d’aujourd’hui), on se retrouve à chaque fois dans ce même univers de pêches intimes où les sensations sont d’une certaine façon similaires.

On se retrouve à chaque fois dans cette même « bulle » où le temps semble s’arrêter et la pêche devient…magique ! Au niveau du matériel on a donc le choix. Chacun compose et personnalise son équipement comme ça lui plaît.

Les techniques, en plus de la pêche traditionnelle au flotteur, sont soit le « freelining » en surface, entre deux eaux ou sur le fond pour la pêche avec des appâts volumineux : pomme de terre, gros morceau de pain, boule de pâte de la taille d’un œuf de poule, etc., soit la pêche avec une plombée coulissant (un Arlesey Bomb inventé par Walker !) de 30 à 45g pour la pêche avec des petites esches : vers de terre, asticots graines, petit flocon de pain, etc. Les puristes ne pêcheront pas au cheveu, mais pourquoi s’en priver ?

Ce qu’on recherche surtout dans cette pêche c’est de traquer la carpe avec une autre approche, plus intime et plus subtile, et de retrouver le vrai plaisir des combats. Cela ne change pas si on monte une esche sur un cheveu, et avec ce dernier il y a tout de même moins de ratés au ferrage.

Quand je pêche au ver de terre, avec du pain ou avec un morceau de pomme de terre cuite je n’utilise pas de cheveu, mais si j’ai envie de pêcher avec une petite bouillette ou avec quelques graines je sais qu’en les mettant sur un cheveu je pêche beaucoup mieux, donc je le fais.

Dans les années 50 il n’y avait pas encore de Monkey Climbers, Swingers ou Hangers.., mais il y avait déjà du papier alu (inventé par un Suisse en 1910 pour emballer le chocolat !) dont on pouvait réaliser des cylindres plus ou moins épais – selon le poids nécessaire par rapport au vent ou courant – qu’on enroulait autour du fil et qu’on glissait en bas d’une aiguille à tricoter plantée dans la terre entre le moulinet et l’anneau de départ.

Par ailleurs il est étonnant de voir à quel point un montage composé d’un petit plomb coulissant de 30-40g, un bas de ligne en Nylon 0,25mm, un hameçon taille 6 et une petite bouillette sur un cheveu est efficace, que ce soit sur des poissons naïfs ou super éduqués. Cela produit des départs d’enfer avec des carpes à chaque fois très bien piquées !

Les poissons éduqués ne pourront pas se servir du plomb pour se débarrasser de l’hameçon, c’est un grand avantage. L’impact d’un petit plomb dans l’eau est très discret comparé au gros « splouf » d’un 130 ou 150g.

Il ne faut pas s’étonner d’avoir une touche dans la minute qui suit, c’est monnaye courante. Avec une pêche subtile au flotteur on a encore plus cet avantage de la « discrétion de l’approche ». Si on pêche à un endroit où circulent des carpes la touche se produit généralement dans les premières cinq minutes !

Sur un poste de passage il faudra être un peu plus patient mais quand les carpes passent il est rare de ne pas avoir une touche, alors que les montages modernes sont souvent stériles même s’il y a des carpes sur le coup. Il faudra que ces dernières soient vraiment en plein activité pour qu’elles commettent une erreur. Donc, avec une approche plus subtile style vintage on a bien plus de touches, c’est une certitude.

LA NOUVELLE MODE VINTAGE | CARP LSDDu très haut de gamme des années 50, en parfait état !

David : Est-ce que toutes les eaux se prêtent à ce type de pêche ?

Leon : Non. Je ne me vois pas pratiquer le vintage sur le lac de la Forêt d’Orient ou sur le Pô quand il est en plein crue par exemple.

Cette pêche est surtout pratiquée sur des eaux de petite ou moyenne superficie où les carpes ont l’habitude de se nourrir en bordure et jusqu’à une bonne soixantaine de mètres de la berge, encore qu’avec une MK IV en bambou refendu je lance sans aucun problème un plomb de 42g à 80 mètres du bord, voire plus avec le vent dans le dos !

La pêche au flotteur se pratique à des distances allant de 0 à 40 mètres environ, mais ce sont les pêches d’extrême bordure qui sont les plus excitantes bien sûr. A vrai dire cette pêche peut se pratiquer sur des milliers d’eaux en France : sur les mares, les étangs, les gravières, les rivières et les canaux.

En France il existe énormément d’étangs qui mesurent d’un à plusieurs hectares, qui hébergent des cheptels de carpes très sympas et qui ne sont pas forcément beaucoup pêchés, et parfois même à peine ou pas du tout. Il est peu probable d’y trouver des carpes de 25 ou 30 kg, mais déjà prendre des poissons entre 10 et 20 kg est un vrai bonheur quand on pêche avec un matériel vintage.., et une vraie bonne surprise n’est jamais exclue…

LA NOUVELLE MODE VINTAGE | CARP LSD À l’époque même les flotteurs (en liège et balsa) étaient des petits œuvres d’art !

Avec un matériel vintage authentique, monté en Nylon 0,25 à 0,30mm, on évite les postes trop encombrés. Il faut respecter les limites que nous impose ce type de matériel, ou alors choisir un matériel plus adéquat pour pouvoir brider les poissons.

Rien ne nous empêche de pêcher au flotteur avec une canne parabolique de 2,5 lb ou plus montée en Nylon 0,35 ou 0,38mm, et au moins cela nous donne la force d’extraire efficacement des carpes d’endroits délicats qui sont aussi souvent des hot-spot.

David : Quel est d’après toi l’intérêt pour un jeune pêcheur français de découvrir et pratiquer ce type de pêche ?

Leon : L’intérêt pour un jeune pêcheur est de pouvoir passer par une vraie case de départ qui lui permet de vraiment bien apprendre et comprendre la pêche, de devenir un vrai bon pêcheur de carpes qui maîtrise son sujet.., plutôt que de devenir un « carpiste instantané » le jour au lendemain, qui pêchera surtout pour gonfler sa galerie photo sur Facebook mais qui ne développera jamais un vrai sens de l’eau !

On voit bien la différence entre les jeunes qui sont passés par la case de départ et les autres qui sont tombés tout cuits dedans en pratiquant dès le départ une pêche moderne stéréotype « copier-coller ».

Un très grand nombre de ces derniers arrêtent la pêche au bout de quelques années, blasés, l’envie et le plaisir ne sont plus là. Heureusement pour le commerce cette couche se renouvelle en permanence, mais c’est bien triste en même temps.

Ceux qui passent par la case de départ développent davantage la passion pour la pêche et restent généralement pêcheur toute leur vie. Cela ne veut pas dire qu’ils pêchent forcément beaucoup durant toute leur vie (bien que ce soit le cas de certains), mais qu’il y a au moins quelque chose de cyclique qui les attire au bord de l’eau dans différents épisodes de leur vie.

Richard Walker a dit un jour que quelqu’un qui sait pêcher régulièrement de belles carpes n’aura aucun problème pour bien pêcher n’importe quel autre poisson sur cette planète ! C’était vrai à son époque, et ça l’est toujours aujourd’hui si on passe par la case de départ !

LA NOUVELLE MODE VINTAGE  | CARP LSD

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