Carpiste de la première génération, Hubert est actif dans le monde de la pêche de la carpe depuis le milieu des années quatre-vingt.
Il fut l’un des pionners à s’intéresser aux techniques modernes venues d’Angleterre qui ont révolutionné la pêche de la carpe en France.
Depuis, il n’a cessé d’apporter son expérience et son œil avisé à cette passion qui ne l’a plus jamais quitté.
Auteur dans les magazines pendant plusieurs décennies, il a marqué les esprits avec des articles techniques et pointus, notamment grâce à son excellente connaissance des appâts et des besoins alimentaires des poissons.
Il a participé à de nombreux enduros, a été membre de l’équipe de France et c’est taillé une belle réputation dans le milieu avec des films vidéo qui ont marqué l’histoire de notre passion. Rencontre avec un homme aussi sympathique que charismatique qui aujourd’hui, fait partie intégrante de notre histoire commune et mérite bien sa place au Panthéon des pêcheurs de carpe français.
1-Comment as-tu découvert la pêche de la carpe ?
Je suis né dans une famille de pêcheurs, tout le monde pêchait, mes parents, mes oncles, mes grands-parents, et déjà tout petit, j’accompagnais mon grand-père maternel quand il allait à la truite dans l’Ardière, une petite rivière du beaujolais.
Pour ce qui est de la carpe, je la pêche depuis au moins 50 ans, mais pour moi le carpfishing est arrivé grâce à une personne avec qui je travaillais, et qui est devenue un ami.
Alain Peyrard, si je peux me permettre de le nommer, a certainement été le premier carpiste de la région lyonnaise. La première fois que nous sommes allés à la pêche ensemble, j’ai été hypnotisé par le matériel qu’il avait, cannes à carpe, détecteurs, etc.
Et comme à l’époque, je n’avais pas trop de moyens, un jour où nous étions à la pêche, je lui ai dit cette phrase : « Alain, je fume ma dernière cigarette, j’arrête de fumer et dans un an, j’ai le même matériel que toi ».
Voilà comment je suis passé de « fumeur » à « carpiste ». On va dire qu’il m’a juste fait changer d’addiction. Pour ça, je peux vraiment lui dire « merci » !
2-Quelle est ta situation professionnelle ?
Je suis dans l’encadrement dans une grande entreprise de chimie lyonnaise.
Aujourd’hui, après 43 ans de travail, je suis très proche de laisser ma place à une autre personne, et de goûter aux joies de la retraite. Et si la santé me le permet, ce que j’espère, j’ai de très nombreux projets « carpe ».
3-As-tu des sponsors ?
J’ai été sponsorisé pendant plus de 20 ans et je le suis encore. Je l’ai été individuellement par de nombreuses firmes, mais aussi collectivement pendant les années où j’étais en « Equipe de France ».
Aujourd’hui, je fais partie de la « Team Rod Hutchinson » depuis plusieurs années, et je me sens très fier de représenter un tel « patronyme ».
Sans jouer les anciens combattants, continuer à maintenir cette « Légende » dans la pêche de la carpe est pour moi, nécessaire.
Trop de carpistes, n’ont aucune « culture carpe », et ne pensent qu’à la bouillette ultime qui va faire exploser leur peson… mais ce n’est pas cela le « carpfishing » !
4-Plutôt pêcheur de longues sessions ou adepte de pêches rapides ?
Personnellement, je suis adepte des sessions de 1 ou 2 semaines au bord de l’eau.
C’est là, ou je peux mettre en application toutes les connaissances que j’ai acquises depuis plus de 30 ans de traque des carpes.
Et puis, il y a tout ce qui gravite autour d’une session longue ; de la préparation avec les potes, l’excitation du jour « J », les milliers de kilomètres (surtout quand on part à l’étranger…) à échafauder des plans, et puis surtout de se dire que l’on a le temps de profiter de tout.
Et ensuite, il y a les souvenirs que l’on ramène, et qui nous maintiennent à flot jusqu’à la prochaine. Passer un weekend avec des potes, et il nous reste quelques anecdotes, mais deux semaines avec ces mêmes potes, à Bin El Ouidane, ce sont des souvenirs indélébiles qui ne s’effaceront jamais !
Voilà pourquoi j’aime les longues sessions !
Mais forcement, comme il faut aussi bosser, je fais aussi des pêches de 24/48 heures.
Et depuis 1 an, je me suis acheté une brouette, et donc je me suis mis aux pêches rapides de quelques heures sur le Rhône en aval de Lyon, et j’avoue que ce genre de pêche est très loin d’être facile.
5-Niveau destination, tu es plutôt privé ou public ?
Personnellement, je pêche à 90% dans le public, que ce soit sur la rivière ou sur les grands lacs. Mes terrains de jeu préférés, sont sans conteste, les lacs de barrage.
C’est sur ces lacs que je me sens le mieux. Tu me mets au bord d’un lac avec de la superficie, des berges abruptes, des arbres morts, des obstacles et de la profondeur et je suis le plus heureux des pêcheurs !
J’adore aussi partir pêcher les grands lacs d’Espagne, je me sens bien sur leurs berges.
Mais j’avoue, il m’arrive d’aller dans le privé, de temps en temps avec Madame ! Mais je les choisis, car je fuis la promiscuité. Pêcher en étant collé les uns aux autres et ne pouvoir pêcher que devant soi ne me convient pas du tout.
Dans ma région, il y en a 2 qui sortent du lot, et même si l’on me taxe de leur faire de la publicité, ils n’en ont franchement pas besoin, car ils sont constamment complets.
Il s’agit de « l’étang de la Clayette » et de la gravière « Carpe Avenir » gérée respectivement par Sylvain Poipy et Florian Rabilloud. Sur ces sites très bien gérés, on peut pêcher sans être oppressé par la foule.
6-Tu es du style à benner lourd ou préfères-tu des amorçages légers et ciblés ?
Je pêche presque uniquement en « spot » ! Je n’ai jamais 2 cannes sur le même spot, donc je préfère les amorçages légers et très ciblés sur mes montages.
En lac de barrage, je fais en sorte que l’amorçage d’un spot ne gêne pas la pêche sur les autres, sinon aucun intérêt de pêcher à plusieurs cannes.
Sur les lacs que je fréquente, quand je vois des pêcheurs mettre une canne de chaque côté d’un obstacle, je me dis qu’il y a un manque de compréhension énorme sur la stratégie à adopter.
7-Côtés présentations, tu es plutôt dense ou flottante ?
Alors là, j’ai de plus en plus de mal à pêcher avec des appâts denses posés sur le fond. Dans la plupart des cas, je pêche en « bonhomme de neige », ou alors décollé.
Que ce soit avec les graines ou les bouillettes, cette présentation reste pour moi une valeur sure.
J’estime que mon esche doit être mise en valeur par rapport au reste de l’amorçage. Mais bon, je sais aussi m’adapter et que quand il faut tout mettre au fond, je le fais.
Mais même sur le fond, il faut quand même que j’allège, c’est une constante chez moi !
8-Quel est ton montage de prédilection ?
Mon montage est ce que l’on nomme « le montage pré-piquage ». Ce montage date un peu, je l’ai utilisé, il y a longtemps, puis délaisser à cause du chant des sirènes de la modernité et j’y suis revenu depuis quelques années.
Depuis que je le réutilise, je n’ai pas peur de le dire, je n’ai plus enregistré de « dépique » lors du combat avec une carpe. Ce sont uniquement les lois de la physique qui font que ce montage est fiable.
Je peux encore avoir des « runs » sans suite, si le poisson a mal engamé l’appât, mais une fois piqué, il est dans le triangle.
Les seuls poissons que je perds, le sont sur des casses !
Il est assez facile à faire, mais il faut respecter impérativement un paramètre : que le bas de ligne soit moins résistant que tout le reste de la ligne.
En même temps, ce paramètre est valable pour tous les montages, quand je vois des mecs pêcher en 30/100 sur les moulinets et avec des bas de ligne en 45lbs, je me dis que le respect du poisson est loin d’être leur priorité.
9-Ton appât préféré ?
Mon appât préféré… bonne question, et je te remercie de me l’avoir posé ! Lol…
Tous les anciens me connaissent comme le « Monsieur graine » de la pêche de la carpe.
J’ai tellement écrit d’article sur les graines dans les revues halieutiques, que je les connais bien, et j’adore les utiliser.
Bien sûr que je pêche aussi avec des bouillettes, mais les graines sont de fabuleux appâts et l’on peut les rendre encore plus irrésistibles avec quelques notions simples de préparation.
Si le site est propice et que j’aie le choix entre une « arachide » et une bouillette, je n’ai aucun besoin de réfléchir.
Cependant, il est vrai que ces dernières années, j’ai fait des pêches de dingue avec les bouillettes en ma possession, mais même dans ce cas, sur la 4ème canne, il y a toujours une graine. Il est impossible de faire plus discret, plus naturel qu’une graine.
10-Quel matériel emploies-tu ?
Durant toutes ces années, j’ai eu en ma possession, un très grand nombre de cannes à carpe.
Mais, depuis mes premières, les fameuses « CarpX » 13 ft 3,5lb, en 3 brins de chez Mitchell, de l’eau a coulé sous les ponts.
Aujourd’hui, j’ai plusieurs jeux de cannes de chez Rod Hutchinson, en 6, 9, 10 et 13 pieds.
Elles me satisfont pleinement, surtout mes DMX 10 pieds en 3,5lb, avec lesquelles je pêche le plus souvent.
Pour les moulinets, je suis encore de la vieille école, et je suis resté fidèle à mes Emblem Z 5500 de chez Daïwa et aussi mes Big Baitrunner de chez Shimano, qui me suivent depuis la coupe du monde 1999 au lac Raduta en Roumanie.
Ils tournent comme des montres, sans avoir été révisé depuis 20 ans, alors que je n’en prends pas spécialement grand soin.
Et pour les détecteurs, on me demande souvent pourquoi je ne les ai jamais changés ! Simplement parce que même avec leur âge avancé, ils font toujours le boulot de me prévenir à la moindre touche !
Il s’agit de la première série de Micron STR de chez Fox, je m’y suis presque attaché, tant ils sont efficaces.
Comme tu vois, je mélange le « Old school » avec le moderne.
Pour le tackle, je pioche dans toutes les marques du marché pour me confectionner mes montages. Je n’ai pas vraiment de préférence, toutes font du très bon matos, mais on ne va pas se mentir, il y a aussi quelques fois de la « merde ».
11-D’après toi, quelles sont les qualités essentielles pour être un bon pêcheur de carpe ?
La question qui tue ! Attends, il faut que je réfléchisse un peu, parce que je ne suis même pas sûre de les avoir !
Je ne sais pas vraiment, mais si j’avais vraiment un critère à mettre en avant, alors, pour être un bon pêcheur de carpe, il faut vraiment aimer ce poisson. Pêcher avec passion, permet presque de réfléchir très vite et d’imaginer ce que l’on ferait si l’on était une carpe.
Alors certains diront que « non », qu’il faut « le sens de l’eau » et que c’est inné ! Moi, je dirai faux !
Pour être un bon pêcheur de carpe, il faut une capacité d’analyse rapide de ce que l’on observe, conjugué à la mémoire de nos échecs et de nos réussites dans des conditions similaires, ce que l’on appelle l’expérience.
Ensuite, on rajoute une pointe de technique, un peu de chance et pour finir, le principal, que les carpes veuillent « bouffer ».
Parce que si la réussite ne tenait qu’à « l’inné », une majorité d’entre nous, dont moi, ne serait plus pêcheur de rien du tout.
12-As-tu un mentor, un pêcheur qui t’a fortement influencé ?
Je n’ai jamais eu vraiment de mentor, dans la pêche ! Mais par contre, beaucoup de très bons pêcheurs m’ont influencé.
J’ai eu la chance d’arriver au début de cette technique, j’ai donc côtoyé beaucoup de très « grands noms » de la carpe.
Certains sont toujours en course comme on dit, d’autres ont disparu de la scène « carpe » pour diverses raisons sur lesquelles je ne vais pas m’étaler.
Mais à l’époque, simple petit pêcheur, j’étais heureux de compter ces personnalités parmi mes amis, comme les frères Mahin, Philippe Lagabbe et d’autres moins connus.
Ces pêcheurs ont influencé les 30 années qui ont suivi. Sans oublier tous les carpistes étrangers que j’ai eu le plaisir de côtoyer très souvent : Rod, Léon, Kevin Maddocks, Achiel Stevens, John Llewellyn, et j’en oublie beaucoup !
A chaque fois, je repartais avec de nouvelles notions qui m’ont énormément aidé pendant toutes ces années.
Certaines images restent gravées dans ma mémoire pour toujours. Comme celle où après un bon repas, je suis assis sur un des canapés de mon salon, à discuter avec John Llewellyn pendant qu’il préparait ses blisters de montages « Bigcarp » en vue de les placer dans les magasins italiens.
A ses débuts, Il passait à chaque fois par Lyon, en allant promouvoir sa marque en Italie.
Nous discutions pêche jusqu’à 4 ou 5h du matin. Avec des personnages comme lui, le temps n’avait plus d’importance…
13-Quel est ton regard sur les réseaux sociaux ?
Aujourd’hui, les réseaux sociaux sont le « pire et le meilleur » en matière de communication.
On va commencer par le meilleur !
Le fait de pouvoir rester en contact permanent avec ses potes de passion, qu’ils habitent à 1 comme à 1000 kilomètres, et personnellement ce qui me rend heureux sur les réseaux sociaux, c’est que je n’ai pas uniquement des « followers » comme on dit, j’ai de la chance d’avoir vraiment beaucoup d’amis.
De continuer à échanger avec des gens que l’on a vu une fois, ou qui me connaissent par mes nombreuses actions depuis 30 ans (enduro, articles de presse, vidéo, etc.) comme si l’on avait été ami de toujours ; je trouve cela cool !
Et lorsque je pars en session, les réseaux sociaux, par mes publications journalières, me permettent de partager et ainsi, de faire participer les personnes qui me suivent, sans bouger de chez eux et de les sortir de leur quotidien.
Ensuite pour le pire ! Il y en a tellement.
Que ce soit le défouloir des haineux, caché derrière leur écran. Ou des « m’as-tu-vu » qui ne se montrent que lorsqu’ils ont une 20+ dans les bras, sans texte pour argumenter et quand leur notoriété baisse, ils ressortent les mêmes poissons sur l’autre face.
Ou quand je vois des pêcheurs totalement inconnus avec leur compteur bloqué à 5000 amis sur Facebook, qui ne publie jamais rien, ou qui ont 10 likes sur leur seule publication annuelle, je me dis que leur première motivation à vouloir avoir autant d’amis, n’est certainement pas le partage.
Mais comme il faut vivre avec son temps, comme on dit, j’y suis comme tout le monde.
14-Comment envisages-tu l’avenir de la pêche de la carpe en France ?
J’ai milité de très nombreuses années pour la pêche de nuit généralisée et je m’aperçois que tant que le renouvellement ne sera pas fait à la tête de la FNPF, nous n’aurons que les miettes et que les viandards de toutes sortes ont encore de beaux jours devant eux.
On va dire qu’à 60 ans, je ne suis pas des plus jeune, sauf que moi, j’ai mon propre cerveau, et que j’ai eu le temps de me rendre compte que le « carpfishing » a relancé ce secteur de loisirs.
Dommage qu’à la tête de la pêche en France, il n’y ai qu’un seul cerveau, et qu’ils se le partagent !
Il est impossible de leur faire changer d’avis, heureusement qu’à la tête de certaines fédérations départementales, il y a de vrais pêcheurs qui pensent plus à l’avenir qu’à leur nombril. Mais ils ne sont pas assez nombreux.
Quand on voit comment l’on a été défendu lors de cette année 2020, ça me révolte ! Mais je vais en rester là, sinon je vais devenir grossier !
15-Des projets ?
Alors là, j’en ai plein !
Déjà, le plus actuel, est de m’occuper de ma toute nouvelle chaîne YouTube « Tribun Hub Carp TV », sur laquelle j’offre à tous les pêcheurs, la totalité de mes connaissances sur la pêche de la carpe.
Ce n’est pas une chaîne comme les autres, au milieu des vidéos session, il y a des tutos, du « Mindset » sans langue de bois, de la technique et surtout de la réflexion.
Je l’ai vraiment lancé le 1 novembre 2020, et elle va s’étoffer avec une nouvelle vidéo par semaine. Les débuts sont prometteurs, j’en suis le premier ravi !
D’ailleurs, si je peux me permettre, je lance un appel à tous les membres de « Carp LSD » de venir me soutenir en s’abonnant, pour que ma motivation soit sans failles pour leur offrir le meilleur.
https://www.youtube.com/channel/UCfSBY0rZKJIpzp7hvcZmHHw
J’ai prévu aussi, si les confinements successifs ne m’en empêchent pas, une session de 2 semaines à Bin el Ouidane au Maroc, avec 2 amis, fin avril 2021.
Je croise les doigts !
Session dans laquelle nous allons faire beaucoup de photos, vidéos et « direct live » pour les pêcheurs qui nous suivront. Soyez au rendez-vous !
Ensuite, ce sera l’Espagne et ses grands lacs, puis l’Italie et le Portugal, tout cela avec ma femme qui aime aussi cette pêche ! Sans oublier mes pêches en France, bien sûr !
Et bien sûr Carp LSD aura la « primeur », de certaines publications que je ferais lors de mes « Road Trip ».
Comme tu peux le voir, je n’ai pas perdu la motivation et en y regardant de plus près, j’aimerais franchement avoir 20 ans de moins, parce que je ne sais pas si je vais avoir le temps de tout faire !